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La réforme de la justice : les nouveautés en matière de procédure pénale de la loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice

La loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice a été promulguée le 23 mars 2019 par le Président de la République, après la décision du Conseil constitutionnel, saisie pour vérifier sa constitutionnalité (QPC n°2019-778).

Selon le gouvernement, les objectifs poursuivis par cette nouvelle loi sont triples : renforcer l’accessibilité et la qualité de la justice pour les justiciables, améliorer le quotidien des professionnels du droit et de la justice, et renforcer l’efficacité de la procédure pénale et de l’exécution des peines.

 

Concernant la procédure pénale, le titre IV de la nouvelle loi, relatif aux dispositions portant simplification et renforcement de l’efficacité de la procédure pénale, comporte les articles 42 à 70, figurant dans cinq chapitres consacrés au parcours judiciaire des victimes, aux phases d’enquête et d’instruction, à l’action publique et au jugement, au terrorisme et au crime organisé, et à l’entraide internationale.

 

Selon leur nature, ces dispositions entrent en vigueur :

 

  • Le lendemain de la publication de la loi, soit le 25 mars
  • Le 1ejuin 2019
  • Le 1eseptembre 2019
  • Après la parution de décret ou arrêtés, actuellement en cours de rédaction, indispensables à l’application des dispositions en question
  • Le 1ejuillet 2021

 

 

  1. Les dispositions immédiatement applicables

 

  1. L’enquête

 

Concernant le recueil des plaintes, trois mesures sont mises en place dès le 25 mars :

 

  • La possibilité de dépôt de plainte dans un service ou une unité de police judiciaire territorialement incompétent et transmission au service compétent (article 15-3 CPP)
  • La possibilité pour les PDAP, victimes ou témoins, de déclarer comme domicile une adresse professionnelle sans l’accord de son employeur (articles 10-2, 40-4-1, 89, 706-57 CPP)
  • La possibilité pour l’OPJ ou l’APJ recevant la plainte de s’identifier par son numéro d’immatriculation dans le procès-verbal (article 15-3 CPP)

 

Concernant la protection et le statut des fonctionnaires et agents exerçant des missions de justice judiciaire :

 

  • Extension de la procédure d’anonymisation des agents de police nationale ou de la gendarmerie nationale (article 15-4 CPP)
  • Habilitation unique des OPJ (article 16 CPP)
  • Serment unique pour les fonctionnaires et agents des administrations et services publics (articles 28 et L130-7 Code de la route)
  • Clarification de la possibilité de co-saisine des OPJ et des fonctionnaires ou agents des administrations exerçant des missions de police judiciaire (article 28 CPP)

 

Concernant l’extension des pouvoirs des enquêteurs quant à la compétence territoriale) :

 

  • Compétence territoriale nationale des OPJ pour poursuivre une enquête sur simple information du PR (article 18 CPP)
  • Possibilité de dépaysement d’une enquête d’une cour d’appel à une autre (article 43 CPP)

 

Concernant l’extension des pouvoirs des enquêteurs quant aux perquisitions et visites domiciliaires :

 

  • Abaissement du quantum encouru permettant les perquisitions en préliminaire sur autorisation du JLD (délits punis de 3 ans d’emprisonnement au lieu de 5 ans) (article 76 CPP)
  • Visite des navires en eaux territoriales (article 78-2-2 CPP)
  • Droit pour une personne non-poursuivie de contester devant le JLD une perquisition 6 mois après celle-ci (article 802-2 CPP)
  • Extension des règles de perquisition concernant un avocat à toutes les perquisitions prévues par des lois spéciales (article 56-1 CPP)

Concernant l’extension des pouvoirs des enquêteurs quant aux réquisitions et contrôles

 

  • Réquisitions par l’APJ (articles 60, 60-1, 60-2, 60-3, 76-2, 77-1, 77-1-1, 77-1-2, 77-1-3 CPP)
  • Possibilité pour un APJ de réaliser des opérations de contrôle routier et simplification des procédures de dépistage alcool et stupéfiants (articles L 234-4, L234)5, L234-9 et L 235-2 du Code de route)

 

Concernant l’extension des pouvoirs des enquêteurs quant aux scellés :

 

  • Possibilité pour les personnes requises aux fins d’examens scientifiques ou techniques, et notamment les médecins légistes en cas d’autopsie, de confectionner des scellés (article 60 CPP)

 

Concernant la garde à vue :

 

  • Possibilité de prolonger la garde à vue en vue du seul déferrement (sauf si existe un « petit dépôt ») (article 63 CPP)
  • Présentation facultative devant le PR ou le JI en cas de prolongation (article 63 CPP)
  • Limitation de l’obligation d’information de l’avocat lros du transport d’une personne en garde à vue aux seuls actes nécessitant sa présence (audition, reconstitution ou « tapissage ») (article 63-4-3-1 CPP)

 

Concernant le terrorisme et la criminalité organisée :

 

  • Modification du délit d’entreprise individuelle terroriste (article 421-2-6 CP)
  • Compétence nationale concurrente de la JIRS de Paris pour la criminalité et la délinquance organisées (articles 706-75, 706-77, 706-80 CPP)
  • Dispositions relatives aux livraisons surveillées

 

  1. L’instruction

 

Concernant l’ouverture de l’information judiciaire et partie civile :

 

  • Généralisation du dispositif du « sas » lors de l’ouverture d’information (article 80-5 CPP)
  • Possibilité de CPC après désistement de l’action civile (article 85 CPP)
  • Possibilité pour le PR de demander au JI un délai de 3 mois avant réquisitions suite à une PCPC pour terminer l’enquête (article 86 CPP)
  • Possibilité pour le JI de rendre une ordonnance de refus d’informer sur demande du PR quand la citation directe est possible et suppression de la nouvelle consignation en cas de citation directe (article 86 et 392-1 CPP)

 

Concernant le déroulement de l’information :

 

  • Possibilité pour les avocats de déposer des demandes par LRAR, même lorsqu’ils exercent dans le ressort de la juridiction (article 81 CPP)
  • Possibilité d’ouverture de scellés par le JI en l’absence du mis en examen si son avocat est présent ou a été convoqué (article 97 CPP)
  • Communication à la partie elle-même non assistée d’un avocat des conclusions des expertises ou (à la demande de la partie) de l’intégralité des expertises (article 167 CPP)

 

Concernant la Chambre de l’instruction et le droit du détenu durant l’information judiciaire :

 

  • Possibilité pour le président de la CHINS de statuer à juge unique sur certaines demandes (articles 41-4, 41-6, 99, 170-1, 706-153 et 778 CPP)
  • Recours devant le président de la CHINS contre l’interdiction de correspondance d’un détenu et pour toutes les décisions de l’autorité judiciaire concernant les modalités d’exécution d’une détention provisoire, notamment les sorties sous escorte (articles 145-4-2 et 148-5 CPP et articles 34 et 40 de la loi n°2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire)

 

Concernant la clôture de l’information judiciaire :

 

  • Possibilité pour le JI de fixer la date d’audience dans l’ordonnance de renvoi devant le tribunal de police ou le tribunal correctionnel si celle-ci lui a été communiquée par le PR (article 179-2 CPP)
  • Simplification des modalités de renvoi aux fins de CRPS (article 180-1 CPP)
  • Uniformisation des délais d’appel des parties à l’instruction (article 185 CPP)

 

  1. Les poursuites

 

Concernant l’action civile :

 

  • Possibilité pour la partie civile de saisir la juridiction pénale en cas d’omission de statuer sur intérêts civils (article 10 CPP)
  • Possibilité pour le président d’une juridiction de jugement de fixer l’audience sur l’action civile en cas d’impossibilité durable de comparution d’une personne du fait de son état mental ou physique (article 10 CPP)
  • Possibilité de renvoi sur l’action civile lorsqu’il n’est pas établi avec certitude que la victime a été avisée de l’audience (articles 391 et 193-1 CPP)
  • Constitution de partie civile par moyen de communication électronique et suppression de l’irrecevabilité si déposée moins de 24h avant l’audience (article 420-1 CPP)

 

Concernant l’amende forfaitaire :

 

  • Suppression de la prise en compte de l’amende forfaitaire comme premier terme de récidive (suppression articles 495-23 et 530-7 CPP)
  • Montant quintuplé pour les personnes morales (article 495-24-1 CPP)
  • Possibilité de prendre les mesures administratives du Code de la route relatives au permis de conduire et au véhicule en cas d’amende forfaitaire (article L121-5 et L325-1-2 CPP)

 

Concernant les alternatives aux poursuites :

 

  • Possibilité pour le PR de proposer une interdiction de paraître à l’auteur des faits
  • Suppression de la transaction OPJ (suppression article 41-1-1 CPP)
  • Suppression de la validation d’une composition pénale par le juge si mesure d’amende ou de restitution inférieure ou égale à 3000 euros pour les délits punis jusqu’à 3 ans (article 41-2 CPP)
  • Extension de la composition pénale aux personnes morales (article 41-3-1A CPP)
  • Information de ses droits et demande de la victime au PR de citer l’auteur devant le tribunal pour CPC (article 41-2 CPP)
  • Possibilité pour les fonctionnaires ou agents exerçant des missions de police judiciaire de mettre en œuvre des mesures alternatives aux poursuites (article 28 et 390 CPP)

 

Concernant les modes de poursuite :

 

  • Simplification de la citation à parquet (article 559 CPP)
  • Possibilité de délivrance d’une COPJ par un agent des douanes ou autre fonctionnaire ou agent exerçant des missions de police judiciaire (article 28, 390-1 CPP et 365-1 Code des douanes)

 

Concernant la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) :

 

  • Possibilité de proposer une peine d’emprisonnement jusqu’à 3 ans (article 495-8 CPP)
  • Possibilité de proposer une révocation de sursis, le relèvement d’une interdiction, d’une déchéance ou d’une incapacité, ou la non-inscription au bulletin n°2 ou n°3 du casier judiciaire (article 495-8 et 495-10 CPP)
  • Extension des motifs de refus d’homologation (article 495-11-1 CPP)

 

Concernant la comparution différée :

 

  • Création de la comparution différée (articles 397-1-1, 393, 393-1 CPP)

 

  1. Le jugement

 

Concernant les délits :

 

  • Fixation des délais de convocation et de droit d’accès au dossier de l’avocat avant audition suite à une demande d’actes (article 388-5 CPP)
  • Possibilité de regroupement de procédures lorsque le tribunal correctionnel est déjà saisi (article 393 CPP)
  • Allongement de 3 à 5 jours de la détention provisoire en cas de transfert d’une procédure entre TGI pôle et infra-pôle (article 80, 394, 397-2, 397-7 CPP)

 

Concernant les crimes :

 

  • Exigence de motivation des peines prononcées par la Cour d’assise (article 365-1 CPP)
  • Extension des possibilités de poursuite par les juridictions françaises des crimes contre l’humanité (article 689-11 CPP)

 

Concernant les mineurs :

 

  • Limitation des conditions de révocation du CJ des 13-15 ans (articles 10-2 et 11 de l’ordonnance du 2 février 1945)
  • Limitation de la durée du maintien en détention après ORTE des 13-15 ans (article 11-2 11 de l’ordonnance du 2 février 1945)
  • Autorisation d’accueil temporaire dans d’autres lieux dans le cadre d’un placement en CED et possibilité de placement en détention provisoire en cas de violation (article 33 11 de l’ordonnance du 2 février 1945)

 

  1. Le prononcé de la peine

 

Concernant la révocation du sursis simple :

 

  • Possibilité de prononcer l’exécution provisoire (article 132-36 CP)

 

Concernant les Travaux d’Intérêt Général (TIG) :

 

  • Augmentation du seuil à 400 heures (article 131-8 CP)
  • Conditions de prononcé en l’absence du condamné (article 131-8 CP)
  • Possibilité de prononcer un TIG pour un mineur de 16 ans au moment de la condamnation âgé de plus de 13 ans au moment des faits (article 20-5 11 de l’ordonnance du 2 février 1945)

 

  1. L’entraide pénale internationale

 

Concernant l’entraide pénale internationale :

 

  • Inscription au FPR de certaines interdictions prévues par une ordonnance de protection ou par une mesure de protection en matière civile ordonnée dans un autre État membre ou par une décision de protection européenne (article 230-19 CPP)
  • Ajout d’un cas de refus d’exécution d’une décision d’enquête européenne et d’inopposabilité du refus de placement sous contrôle judiciaire à la demande d’un autre État membre en raison de l’absence de réciprocité d’incrimination en droit français pour une série d’infractions (article 694-31 et 696-73 CPP)
  • Extension des mesures de contrainte à l’encontre des personnes faisant l’objet d’un mandat d’arrêt européen, d’une demande d’extradition ou d’arrestation provisoire et mesures favorisant l’extension des poursuites à d’autres infractions antérieures à la remise (article 695-26, 696-9-1 et 696-47-1 CPP)
  • Pénalisation de la violation des mesures de protection en matière civile émanant d’autres États membres (articles 227-4-2 CP)

 

 

  1. Les dispositions applicables au 1ejuin 2019

 

Seront applicables au 1ejuin 2019, les dispositions concernant :

 

  • Les écoutes et géolocalisation (article 42 de la nouvelle loi)
  • Les enquêtes sous pseudonyme (article 45 de la loi)
  • Les techniques spéciales d’enquête (article 46 de la loi) (un décret est également attendu)
  • L’avis obligatoire du curateur/tuteur lors GAV et d’une audition libre d’une personne protégée (article 48 de la loi)
  • Les modifications de l’ARSE (article 54 de la loi)
    • Suppression de l’exigence d’accord préalable de la personne concernée
    • Caractère facultatif du débat contradictoire imposant la présence du procureur
    • Permission ou obligation, selon les cas, de l’enquête de faisabilité du SPIP
    • Simplification et clarification du régime de l’ARSE après renvoi devant la juridiction de jugement
  • L’extension de la visio-conférence sans l’accord de la personne aux audiences de prolongation de la détention (article 54 de la loi)
  • La simplification du déroulement de l’instruction en matière de délit de presse (article 54)
  • La mise en œuvre du mécanisme du règlement contradictoire à la clôture de l’instruction sur la demande des parties (article 56 de la loi)
  • Les nouvelles formalités de l’article 175 CPP (article 56 de la loi)
    • Les parties et témoins assistés doivent, dans les 15 jours qui suivent l’envoi de l’avis à partie, indiquer au juge d’instruction, par déclaration au greffe, qu’ils entendent exercer un ou plusieurs des droits légalement prévus, à savoir faire des observations, régulariser des demandes d’actes ou une requête en nullité, faire des observations lorsque le réquisitoire définitif sera notifié
  • L’appel devant le juge unique et limitation de la portée de l’appel
  • L’encadrement de la durée de détention provisoire en appel en matière correctionnelle et en matière criminelle (pour les appels formés à compter du 1ejuin 2019) (article 62 et 63 de la loi)
  • L’atténuation de l’oralité devant la procédure Cour d’assises (article 63 de la loi)
  • La possibilité de nommer des magistrats honoraires juridictionnels à titre temporaire comme assesseurs dans les Cours d’assises (article 63 de la loi)
  • La transposition de la directive « mineur » (notamment avocat obligatoire en audition libre, et accompagnement du mineur par un adulte approprié ou un administrateur ad hoc en cas de carence des parents) 61-1 QPC

 

 

  1. Les dispositions applicables au 1eseptembre 2019

 

Sera applicable au 1eseptembre 2019 l’extension du juge unique et OP (article 61 de la loi).

 

 

  1. Les dispositions applicables après la parution d’un décret ou d’un arrêté

 

Sont en attente :

 

  • La plainte en ligne (article 42 de la loi) : en attente d’un décret cadre et de décrets et arrêtés CNIL pour chaque service en ligne dédié à telle ou telle catégorie d’infraction
  • L’agrément association de victimes (article 42 de la loi) : report à une date fixée par décret, et au plus tard un an après la publication de la présente loi
  • Le dossier de procédure numérique (article 50 de la loi) : attente d’un décret et d’un arrêté
  • L’expérimentation de l’oralisation (article 50 de la loi) : attente d’un arrêté
  • La simplification de l’expertise de police technique et scientifique (article 54 de la loi) : attente d’un arrêté
  • L’extension des amendes forfaitaires à certains délits (article 56 de la loi) : en attente d’un décret
  • L’expérimentation de la Cour criminelle : attente d’un arrêté (début des expérimentation, renvoi devant le CC et premières audiences en septembre) (article 63)
  • L’incompétence des juridictions pénales au profit du seul juge civil du tribunal de Paris pour statuer sur l’indemnisation des préjudices résultant d’infractions pénales qui constituent des actes de terrorisme : attente d’un décret en Conseil d’Etat (article 64)
  • Le parquet national anti-terroriste : date fixée par décret et au plus tard le 1ejanvier 2020

 

 

  1. Les dispositions applicables au 1ejuillet 2021

 

Deux dispositions sont reportées au 1ejuillet 2012 :

 

  • L’inscription au casier judiciaire des amendes forfaitaires pour délits et C5 (article 58 de la loi)
  • L’inscription au CJN des compositions pénales des PM (article 59de la loi)

 

Presse écrite